Pour vous sans doute, comme pour moi, Téléphone demeure le plus grand groupe de rock français jamais apparu. Leur retour à trois sous le nom des Insus n'a fait que renforcer cette sensation.
J'ai eu le bonheur d'écrire :
à partir de longues interviews de Jean-Louis, Louis, Richard, Corine et aussi de leurs proches.
D'où la question :
quelles sont les 10 chansons que je considère les plus essentielles dans la carrière de Telephone ?
Réponse ci-dessous... J'ai fait un 'mix' entre mes goûts personnels et les chansons incontournables. Et j'en profite pour vous raconter un peu de leur histoire.
Et vous, quelles sont les vôtres ? Vous pouvez m'écrire à l'adresse indiquée sur cette page.
C'est le plus grand 'tube' du groupe Téléphone, et une abonnée des radios FM. Elle est sortie en 1984 sur l'album du même nom.
La mélodie de Un autre monde est apparue à Aubert alors qu'il se trouvait dans son domicile près de la Gare de l'Est, contraint de garder la chambre pour cause d'une infection rénale. Solitaire et déprimé, il a laissé ses doigts glisser sur un synthétiseur dont il avait fait l'acquisition six mois plus tôt ; un Prophet V.
Sur le Prophet V, Aubert a plaqué quelques accords et dit avoir senti venir cette musique, d'abord très lente.
"L'idée d'un autre monde venait peut-être à l'origine du son un peu galactique. Ce n'est qu'après que le vrai sens de la chanson est venu se greffer."
Il est à noter que Bertignac a contesté cette version, affirmant qu'il avait lui-même trouvé cette mélodie en s'inspirant de 'Jealous Guy' de John Lennon.
Le texte était une réflexion sur l'existence de Jean-Louis mais aussi sur sa situation à cet instant : un ancien jeune homme désabusé qui avait rêvé d'un monde, où la terre serait ronde…
" Je me suis dit : cela fait dix ans que je n'arrête pas d'écrire des chansons. Je rêvais d'un autre monde et puis voilà ma situation, je suis devant ce synthé, seul, malade... Cette chanson était un peu charnière parce qu'après, je me suis dit, c'est bien d'essayer de rêver d'un autre monde, mais c'est bien aussi de le mettre en pratique à cette minute même."
Sur la tournée, Un tour sur moi-même, en introduction à Un autre monde Jean-Louis a apporté quelques faits supplémentaires :
" Je n'étais pas en bonne santé, dans ma petite piaule. Je m'étais acheté un beau synthé, cela donnait une musique planante qui m'évoquait Jean-Michel Jarre. J'ai chanté, un peu tristement, 'j'ai rêvé d'un autre monde mais à quoi ça sert de rêver si le mien est tellement nase', c'était un peu le sens. C'est le seul moment dans ma vie où l'idée du suicide est passée comme cela. J'avais deux options : me tuer ou sortir dans la rue. J'ai pris la deuxième. Sortir simplement dans la rue sans savoir quoi y faire.
Quand je suis sorti, la vie s'est enchaînée d'une manière complètement différente, peut-être parce que sur mon front, c'était écrit que j'étais disponible pour de nouveaux contacts, de nouvelles demandes. Peu de temps après, j'ai rencontré la femme que j'aimais et que j'aime toujours. J'ai eu un fils. Téléphone s'est défait. Cela a changé du tout au tout en un an, à partir de ce choix que j'ai eu de sortir dans la rue ce jour là. "
Interview sur CSTAR à propos de l'histoire de Téléphone
Un autre monde était donc un morceau spatial, sur un tempo mesuré, à la " Stairway to heaven "… Puis, quelques semaines plus tard, Jean-Louis s'est rendu en répétition afin de présenter sa nouvelle œuvre à ses acolytes. Il a joué les premières mesures d'introduction transcrites sous forme d'arpèges à la guitare. Et puis, avant même qu'il n'ait commencé à chanter, Richard a lancé deux coups de grosse caisse phénoménaux. En un éclair, la chanson a été métamorphosée ! Aubert en a instantanément adapté l'esprit, n'estimant pas nécessaire de contrer une telle fougue. En l'espace de quelques secondes, Un autre monde est ainsi devenu un morceau à la Téléphone !
Suite à l'enregistrement du morceau en Angleterre, Aubert a estimé que Un autre monde était l'une chansons des plus réussies que le groupe ait jamais gravées.
" Tu as vraiment les quatre éléments du groupe, tu sens bien qui est quoi, que rien n'est rajouté. "
L'album Un autre monde est sorti le 7 mai 1984. Les pré commandes ont été telles qu'il a été disque d'or avant même d'être publié. Pourtant, curieusement, Virgin a sélectionné "Oublie ça" comme le premier single. Progressivement, les ventes se sont ralenties
Durant l'été, force a été de constater que l'album Un autre monde ne marchait pas aussi bien que les albums précédents.
La sortie du 45 tours Un autre monde lors de la rentrée a rétabli les choses. Elle était accompagnée de la diffusion d'un clip en noir et blanc réalisé par Jean-Baptiste Mondino mettant en scène un jeune enfant, observant la ville grise depuis les vitres d'un métro aérien parcourant la capitale. Un contraste saisissant entre les images monochromes et l'imaginaire que véhiculait les mots. À la fin du clip, une girafe venait évoquer la fameuse pochette de l'album.
Immense hit, le 45 tours a manqué de peu la position n°1 du tout nouveau Top 50. Le disque est demeuré durant vingt semaines dans les trente premières positions. Nageant dans le sillage de ce poisson pilote, l'album Un autre monde a été l'un des meilleures ventes du groupe, atteignant 600 000 exemplaires en France.
C'est un morceau vif, imparable, où ressort où toute la frénésie juvénile du groupe au moment où ils l'ont enregistrée (1977). Avec un gimmick péchu, des guitares enlevées, une batterie déchaînée.
Métro, c'est trop est la démonstration que le rock à la française, c'est une réalité.
Là n'est pas tout. Il semblerait bien que Métro, c'est trop ait été la toute première chanson écrite par Jean-Louis…
Au cours de l'été 1973, alors qu'il travaillait comme menuisier, Jean-Louis a lancé un défi à un ami, Jean-Marc. Tous les deux devaient écrire une chanson sur le métro et la montrer à l'autre le lendemain. Jean-Marc n'y a plus pensé et il est revenu bredouille. Pour sa part, Jean-Louis a accouché d'une prose, un texte qui allait faire du chemin et s'appelait Métro, c'est trop…
Trois ans plus tard, Jean-Louis passe des vacances à Ibiza avec ses amis Olive et François Ravard - le futur manager de Téléphone. Ce paradis artificiel le lasse progressivement. Pour tromper l'ennui, il empoigne sa guitare acoustique, égrenant quelques accords et jetant sur le papier quelques embryons de texte, tels Hygiaphone et, à nouveau, Métro, c'est trop .
A la rentrée 1976, lors d'un concert improvisé dans une clinique pour handicapés proche de Neuilly, Jean-Louis et Olive assurent les guitares tandis que curieusement, Bertignac s'est mis à la batterie.
" C'est à cette occasion que nous avons chanté les toutes premières chansons de Téléphone : 'Hygiaphone', 'Métro c'est trop', 'Prends ce que tu veux'… " dit Aubert.
Peu après, Téléphone donne son tout premier concert au Centre Américain devant 500 personnes environ.
D'une voix fluette, Jean-Louis apostrophe le public lâchant :
- Salut, nous on est venus en métro ! Vous, vous êtes venus comment ? Celle-là s'appelle Métro, c'est trop!…
Comme il se doit, la chanson a figuré sur le premier album et son gimmick est devenu légendaire.
C'est pour l'album Dure Limite que Bertignac a enregistré ce qui est demeuré comme son plus grand tube : Cendrillon…
Cendrillon est une chanson qui a pris de l'importance au fil du temps.
En premier lieu, lors des concerts de Téléphone, à partir de 1982, elle a permis de démontrer qu'il existait un attachement très particulier du public envers cette chanson : c'est la seule qu'ils chantaient spontanément en chœur, durant l'interprétation de Louis. On peut en avoir le cœur net sur l'album Téléphone le live publié après la séparation du groupe et l'écoute de cette version enregistrée au Zenith en octobre 1984 est émouvante.
Deuxième point : Cendrillon est devenue, conjointement à Un autre monde, une abonnée des stations FM. Ces deux chansons figurent probablement dans le Top 10 des morceaux les plus diffusés en radio.
La chanson elle-même met en scène la désillusion progressive d'une fille qui semble s'apparenter à la Cendrillon du conte de fée - mais avec un destin bien plus tragique que dans l'original où tout se termine.
Corine a longtemps pensé que Louis Bertignac avait écrit Cendrillon, l'histoire de la " plus jolie des enfants ", juste pour elle. Pourtant, Louis affirme plutôt avoir été inspiré par l'actrice Romy Schneider, sur laquelle il avait jadis une véritable fixation. Dixit Louis :
"Au départ, j'écrivais sur mon carnet, toutes sortes de choses. J'avais envie d'une histoire avec des héros un peu déchus. Il y avait Mickey, Goldorak… Et ils finissaient mal. Et il y avait entre autres Cendrillon. Et finalement, au fil des mois, j'ai fini par retirer tous les autres pour ne garder que Cendrillon. Romy Schneider, pour sa part, venait de mourir. Or c'était une princesse, la princesse Sissi. Donc c'était un peu la fin de cette Cendrillon…"
Écrit à la maison vers 1981, le premier texte de la chanson était plus sombre encore que la version finale.
Avec Bertignac en octobre 2014 pour Sud Radio
Cendrillon n'a plus 20 ans et plus d'enfant depuis longtemps
Son bel amant a foutu le camp avec la Belle au Bois Dormant
Elle ne sait plus où ni comment, tout ceci est tellement loin
Et Cendrillon n'a plus le temps, elle fait ses malles, reprend ses biens, elle part...
(…)
Pendant son sommeil infini, la Belle au Bois s'est endurcie
Cent ans d'inaction ont suffi à la changer en junkie
Une infirmière lui serre le bras, ses jolis cils ne frémissent pas
Les tuyaux dansent dans l'ambulance et tout ça n'a plus d'importance, elle part...
Par la suite, ce texte a été retravaillé pendant des mois. On peut écouter une autre version du texte sur l'un des bonus des Rééditions : Cendrillon - acoustique session de travail du 12 mars 1982. Jean-Louis Aubert dit avoir apporté son assistance à la version finale.
La toute première version enregistrée par Téléphone était plus longue que celle sortie sur l'album Dure Limite. Louis y disait notamment sur le finale :
Cendrillon a peur, Cendrillon s'affole,
Cendrillon est folle, Cendrillon est folle,
Le producteur Bob Ezrin a estimé qu'il était préférable que cette partie soit écartée.
La version intégrale, retrouvée par Louis dans ses archives, a figuré sur certaines versions jouées sur scènes à partir de 1996, et donc sur le double album Bertignac Live sorti en 1998.
Vers le début des années 2000, Cendrillon passait si souvent sur la FM qu'un jeune d'alors pouvait aisément croire qu'il s'agissait d'une nouvelle chanson. Il est vrai que la chanson est plus douce que les morceaux usuels du groupe, notamment par la présence d'un synthétiseur en toile de fond. Pourtant, c'est bel et bien un morceau rock, avec un bel arpège en introduction et un superbe solo vers le finale.
Argent trop cher est un bon exemple d'un texte où Jean-Louis Aubert s'impose comme un chroniqueur générationnel dont les mots font mouche.
Avec un gimmick, comme Argent trop cher, il fait sonner la langue française en phrasé rock'n'roll - et de fait, ce gimmick s'insinue dans la psyché et n'en sort plus.
Fait rare dans la chanson française, le morceau s'attaque aux effets pervers de l'argent…
Prenez un enfant
et faites-en un roi
Couvre-le d'or et de diamants
Cachez-vous en attendant
Vous n'attendrez pas longtemps
Les vautours tournent autour de l'enfant
(...)
Il est vrai aussi qu'à l'époque où le disque est sorti, Téléphone a traversé une grande crise - qui a failli signer la fin du groupe. Jean-Louis Aubert avait touché les droits d'auteurs des chansons qu'il avait intégralement écrites et les autres membres du groupes n'avaient pas voulu accepter l'idée qu'il ne partage pas ces fameux droits - il avait finalement cédé.
Dès le jour de sa sortie en mai 1979, Crache ton venin a frôlé les 100 000 exemplaires, l'équivalent d'un disque d'or. La chanson La bombe humaine est rapidement devenue un hymne générationnel et a contribué à imposer Téléphone comme le premier groupe de rock en France et déjà indétrônable.
Mettant en perspective l'existence qu'ébauchaient jour après jour les jeunes et la nécessité pour eux de prendre en main leur destin, La bombe humaine révélait une intensité nouvelle avec une accroche que n'auraient pas renié Lennon ou Jagger. Jean-Louis l'avait d'abord écrit sous la forme d'une nouvelle en prose, qui flirtait avec l'anticipation et la science-fiction…
À force d'écrire et réécrire ce récit, il a senti une musique se greffer sur les mots.
" Finalement, de 50 pages, cela s'est transformé en dix lignes, pour coller à la musique, " raconte Jean-Louis.
La bombe humaine avait pris forme.
Un an et demi plus tard, Aubert a retrouvé l'original et ce qui l'a frappé, c'est que toutes les idées essentielles disséminées dans les cinquante pages de la nouvelle se retrouvaient dans la chanson.
Le producteur Philippe Constantin qui a signé Téléphone chez Pathé Marconi a quitté cette maison de disques à la fin de l'été 1978, mais il conservé des liens très forts avec le groupe. À ses yeux, la chanson La bombe humaine revêtait une importance très particulière. Persuadé que le groupe tenait là un immense tube, il demeurait admiratif de la maquette de démonstration qu'avait réalisé Téléphone et redoutait que la version enregistrée ne possède pas la même magie.
Au final, il n'a pas eu à déchanter…
Comme d'autres chansons du groupe, New York avec toi n'a pas connu un grand succès à sa sortie - issue de l'album Un autre monde, elle est sortie sous la forme d'un 45 tours en 1985. Elle a pourtant été intégrée au générique du film Marche à l'ombre (1984) mais cela ne semble avoir suffi. Par la suite, elle est entrée dans la légende, devenant un passage obligé pour de nombreux aspirants guitaristes.
Quid de la source d'inspiration ? En premier lieu, Jean-Louis Aubert avait débarqué à New York avec son ami Olive le 5 juillet 1974 juste après avoir eu son Bac. Il y avait retrouvé Louis Bertignac et un autre ami, Lionel et tous les quatre ont traversé l'Amérique jusqu'à San Francisco avant de revenir à New York. Par la suite, en 1983, Téléphone a effectué une brève tournée en Amérique, et s'est produit dans divers clubs dont le CBCG. C'est cette visite de 1983 qui aurait été la principale source d'inspiration.
"Dure limite, cette chanson était dure à écrire, je n'aimais pas tellement y toucher, " raconte Jean-Louis.
" Cela me tenait à cœur, et je ne savais pas comment le dire, elle me faisait un peu mal cette chanson. "
Le texte a subi maintes variations que Aubert a éliminées tour à tour.
La première version a été écrite devant le mur de Berlin et texte commençait par "Le mur de Berlin, n'a pas, n'a pas de fin." Sur le carnet de notes de Jean-Louis, il avait placé en regard de ces quelques mots un petit dessin montrant un militaire allemand.
C'est le producteur américain Bob Ezrin qui a produit l'album Dure Limite. La chanson Dure Limite lui rappelait le dernier grand projet sur lequel il avait opéré, The Wall des Pink Floyd.
Un soir, dans une chambre, Louis et Jean-Louis ont écouté les premières moutures de l'album. Ils ont alors convenu que la sauce commençait à prendre et ont décroché leur téléphone afin d'en faire part à Ezrin.
Celui-ci a convenu avec eux que le résultat était intéressant, mais il a alors annoncé :
" à présent, nous allons refaire tous les instruments. "
Et de tracer un planning très précis :
" Toi, Jean-Louis, tu viendras lundi, mardi, mercredi pour refaire la rythmique de 'Dure limite'… "
Sur place, Aubert a joué l'introduction de la chanson sur toutes ses guitares depuis les Gibson et Stratocaster électriques jusqu'à la douze corde acoustique, à charge pour l'ingénieur du son de les superposer. Ezrin avait insisté là-dessus ; il avait déjà procédé ainsi et le résultat a été superbe.
Il demeure que Dure Limite a été un album fort différent des autres, extrêmement produit. Avec toutefois un avantage : il est fort marqué par le son 'années 80' et certains adorent cela !
En 1974, Bertignac et Aubert se retrouvent régulièrement dans la 4L de Louis pour se livrer à des jams, guitare à la main. Pourtant, deux mois avant l'échéance fatidique que représentait le Bac, Jean-Louis a soudain disparu de la circulation. En prévision de l'examen, il révise tel un forcené et allait décrocher son Bac. Il semble que ce soit à cette époque qu'il a écrit les toutes premières bribes de ce qui deviendrait Hygiaphone , à la base un rock'n'roll à la Chuck Berry. La musique est née lors d'un travail de répétitions sur une idée que Louis pense avoir initialement apportée, mais la chanson a peu à peu été mise en forme par Jean-Louis.
A la fin de l'été 1976, à Ibiza, un soir, Jean-Louis et ses deux amis ont été invités à une soirée sous les pins réunissant quelques ex-hippies. Et Jean-Louis, qui jouait avec Olive, a été surpris du bon accueil réservé à leur prestation. Il s'est enhardi à interpréter quelques-unes de ses compositions en français et a pu constater qu'elles faisaient mouche.
Un matin, Aubert s'était réveillé, comme au sortir d'une réanimation… Ça y est ! C'est bon ! Il faut rentrer dare dare. Sur le chemin du retour, il s'est exclamé :
" Je sais ce que nous allons faire. Nous allons monter un groupe de rock ! Je vois comment cela va fonctionner, j'en suis sûr. "
Sur le port, Olive lui a demandé quelles étaient les chansons qu'ils pourraient interpréter au juste ? Aubert a répondu en égrenant les premières versions de Hygiaphone , du "Vaudou" et autres créations personnelles. Il avait la conviction qu'il fallait les chanter telles quelles, en français.
" Il y avait comme une urgence. C'est curieux, car je nous visualisais sur une scène du Rose Bonbon… "
Peu après, en vue du tout premier concert de Téléphone au Centre Américain, les 4 membres ont répété quelques reprises des Stones ou du Zeppelin mais aussi des chansons composées par Jean Louis Aubert telles que Métro, c'est trop.
Et de fait. Lors de ce premier concert, le groupe a interprété des reprises des Rolling Stones, comme Connection, arrangé en reggae, Street Fighting Man et de Led Zeppelin, mais aussi diverses chansons originales, comme Hygiaphone .
Présente sur le 1er album, Hygiaphone a été leur premier hit.
Pour Çà, c'est vraiment toi, comme bien souvent, Jean-Louis est venu avec un embryon de chanson, quelques accords sur une guitare sèche. Louis a alors trouvé le riff qui avait donné sa force au morceau. Le producteur Bob Ezrin a tenu à superposer un grand nombre de voix, afin de transmettre l'ambiance d'une fête.
Vers le final, il a tenté de pousser Jean-Louis à improviser quelques onomatopées à la " hmm, hmm, hmm, hmm " mais ce dernier s'est arc-bouté : il ne sentait pas du tout de telles interventions. Faute de parvenir à ses fins, Ezrin s'est rapproché de l'ingénieur du son afin d'échanger quelques mots en conciliabule. Peu après, il est revenu dans le studio a hurlé :
" Maintenant, sale petit froggy, tu vas nous la chanter ta p… de partie ! ".
Isolé derrière un paravent, Aubert a obtempéré.
" Il a eu raison de faire cela, même s'il y avait une part de cinéma, parce que je butais comme un mulet… " reconnaît le chanteur.
Bob Ezrin avait l'habitude de productions qui pouvaient s'étaler sur une année ou deux, une durée que le quatuor n'était pas disposé à supporter.
Vers le début d'avril, le groupe attendait impatiemment dans son hôtel que lui soient livrés les mixages finaux. Une attente fastidieuse qui les rongeait tandis qu'ils tournaient en rond dans leurs chambres.
Et puis, à trois heures du matin, Ezrin a appelé, un brin penaud :
"Jean-Louis… J'ai effacé ta voix vers la fin de 'Çà, c'est vraiment toi', mais elle repasse dans tous les instruments, il faut que tu reviennes vite".
Au milieu de la nuit, Aubert s'est habillé et s'est rendu au studio. Ezrin a alors pointé les petites voix improvisées que l'on entendait en filigrane ici et là : " attention les gars ", " hum, hum, hum, hum ", " non, non, non, non… ".
Ces fameux effets de voix qu'il n'aimait pas et qu'il avait dû faire à contrecœur, voilà qu'il a dû les reproduire à l'identique !
Au bout du compte la chanson a été un de leurs plus gros succès. Çà, c'est vraiment toi est tout de même apparue plus 'commerciale' que les morceaux d'un album comme Au cœur de la nuit. Elle demeure fort honorable, notamment grâce au très beau solo de Louis qui figure vers la fin.
Le riff est ouvertement emprunté à la chanson Without love des Dobbie Brothers et l'on peut trouver qu'il existe aussi une certaine ressemblance avec ce tube du début des années 70 dans le refrain. Un peu de ton amour vient rappeler que Téléphone (mais aussi Jean-Louis et Louis dans leurs carrière solo) ont parfois ressourcé dans leurs chansons un peu de ce qu'ils avaient adulé chez leurs héros : les Stones, Led Zeppelin, les Beatles, etc.
Qu'importe. La chanson est bien troussée et elle montre que le groupe peut s'aventurer dans des compositions 'pop' avec de belles harmonies.
Un peu de ton amour est présente sur le 2ème album, Crache ton venin, celui qui a consacré Téléphone et l'a clairement installé comme 1er groupe français...
Si vous êtes fan de Téléphone, vous ne pourrez pas lâcher ce livre. Il est issu de dizaines d'heures d'interviews que j'ai eu avec les membres du groupes, leurs amis d'enfance, leurs proches, leurs compagnons de route...
Les anecdotes indiquées ici sont tirées des livres
Des extraits audio d'interviews réalisées par l'auteur ont été reproduits sur les pages en question.